La comparaison est voleuse de joie
Pourquoi nous nous sabordons avec notre obsession toxique de la vie des autres ?
13.
Un chiffre qui fait trembler.
Un chiffre qui effraie.
Un chiffre qui porte malheur.
Ou pas.
Car la vraie malchance n'est pas dans les chiffres.
Elle est dans notre regard.
Aujourd'hui, je vais briser les codes.
Non pas pour parler de design, d'entrepreneuriat ou de créativité.
Mais pour aborder un sujet qui nous touche tous.
Qui nous paralyse tous.
Qui nous vole à tous notre joie de vivre.
La comparaison.
Cette petite voix qui te murmure à l'oreille:
”Regarde-le, il a déjà lancé trois startups réussies à ton âge.”
”Regarde-la, ses designs lui apporte 200K followers, et moi seulement 578”
”Regarde-les, avec leur vie parfaite, leur couple idéal, leur maison sublime.”
”Regarde, son corps est parfait, et moi je suis une patate…”
Cette petite voix, je la connais bien.
Elle m’accompagne depuis des années.
Elle m'a fait perdre un temps précieux.
Elle m'a volé d'innombrables moments de joie.
Elle a transformé mes progrès en stagnations.
L'illusion de la comparaison
As-tu déjà remarqué ce phénomène étrange?
Plus nous avons accès à de l'information sur les autres, plus nous nous sentons inadéquats.
Plus nous voyons de contenus inspirants, plus nous nous trouvons quelconques.
Plus les outils pour "réussir" sont accessibles, plus nous avons l'impression d'échouer.
C'est le grand paradoxe de notre époque connectée:
Nous n'avons jamais eu autant de modèles d'inspiration.
Nous n'avons jamais eu autant de complexes.
Mais pourquoi?
Parce que nous comparons notre réalité brute, avec ses hauts et ses bas, à une version ultra-filtrée, ultra-sélective, ultra-parfaite de la vie des autres.
Nous comparons notre making-of aux best-of des autres.
Nous comparons notre vie entière à leurs meilleurs moments.
La lentille déformante de l'algorithme
Cette tendance naturelle à la comparaison a toujours existé.
"L'herbe est toujours plus verte chez le voisin."
Ce proverbe n'a pas été inventé à l'ère d'Instagram et de TikTok.
Mais aujourd'hui, cette comparaison est amplifiée par un système sans scrupule et implacable: L'algorithme.
Ces machines à engagement ne sont pas neutres ¹.
Elles nous montrent ce qui nous fait réagir.
Ce qui nous maintient sur la plateforme.
Et qu'est-ce qui fonctionne le mieux ?
L'exceptionnel. L'extraordinaire. L'extrême.
Des corps parfaits sculptés par la génétique, les suppléments et le temps
Des réussites fulgurantes qui cachent des privilèges et des échecs
Des performances surhumaines présentées comme accessibles
Des relations idylliques qui masquent les difficultés quotidiennes
L'algorithme transforme l'exception en norme.
L'algorithme fait de l'élite une référence.
L'algorithme rend l'extraordinaire banal.
Résultat ?
Nous nous comparons à une illusion.
Cette designer influenceuse ?
Elle ne te montre pas les 50 versions ratées avant le résultat final.
Cet entrepreneur star ?
Il ne parle pas des années de galère avant son succès.
Ce couple parfait ?
Il ne filme pas les disputes, les compromis, les moments difficiles.
Cette lentille déformante nous renvoie une image faussée du monde.
Et nous nous sentons inadéquats face à ce mirage.
Ce que nous perdons dans cette course
La comparaison n'est pas juste un inconfort passager.
C'est une voleuse. Une prédatrice. Une vandale.
Et que nous vole-t-elle?
Elle nous vole notre joie.
Celle d'apprécier nos petites victoires quotidiennes.
Celle de célébrer nos progrès, aussi minimes soient-ils.
Elle nous vole notre confiance.
Celle de croire en nos capacités uniques.
Celle d'avancer sans constamment regarder par-dessus notre épaule.
Elle nous vole notre présent.
Car pendant que nous admirons le parcours des autres, nous oublions de vivre le nôtre.
Pendant que nous fantasmons sur d'autres vies, nous négligeons celle que nous avons.
Elle nous vole notre singularité.
Car à force de vouloir ressembler aux autres, nous diluons ce qui fait notre unicité.
À force de suivre des voies tracées, nous abandonnons la nôtre.
Mon parcours personnel avec la comparaison
Je te l'avoue sans détour: je suis un expert en comparaison toxique.
Un champion de l'autodépréciation par procuration.
Un médaillé d'or de l'insatisfaction chronique.
Dans Buro #1, j'évoquais ces "deux années compliquées" que je venais de traverser. Je n'entrais pas dans les détails, mais une partie de cette difficulté venait de là:
Me comparer. Sans cesse. À tout le monde.
Chaque designer dont j'admirais le travail devenait une preuve de mon incompétence.
Chaque entrepreneur à succès soulignait mon manque d'ambition.
Chaque créateur prolifique pointait ma procrastination.
Cette comparaison constante a érodé ma confiance.
Elle a paralysé ma créativité.
Elle stoppé ma vie.
Pendant deux ans, j’ai tout stoppé car j’attendais que ceci ou cela arrive.
Mais j’ai oublié de profité de ma vie.
Deux ans sans accomplissements, deux ans sans vacances, deux ans de burn-out constant.
Jusqu'à ce que je comprenne une vérité fondamentale: Je ne suis pas eux.
Et c'est ma plus grande force.
Le prix de la comparaison
Le coût de cette habitude est astronomique:
De l'anxiété qui paralyse
De la dépression qui isole
Du temps perdu à ruminer
De l'énergie gaspillée à envier
Des opportunités manquées par peur
Des relations sabotées par insécurité
Dans certains cas extrêmes, la comparaison mène à des troubles graves:
Je me souviens de cette mode du thigh gap⁶ sur les réseaux.
Des milliers de jeunes femmes sont tombées dans l'anorexie.
Pour un écart entre les cuisses qui dépend... de la génétique et de la structure osseuse.
Ou ces hommes qui se dévalorisent parce qu'ils ne ressemblent pas à des machines de guerres ou des super-héros.
Sans comprendre les régimes drastiques, l'entraînement extrême, et parfois les substances douteuses derrière ces physiques.
La comparaison n'est pas qu'un malaise.
C'est une épidémie silencieuse.
Retrouver sa propre mesure
Comment sortir de ce cycle infernal ?
Comment retrouver la joie simple d'être soi ?
Je n'ai pas toutes les réponses.
Je suis encore en chemin moi-même.
Mais voici quelques pistes qui m'ont aidé:
1. Prendre conscience de la distorsion
La première étape est de réaliser que ce que nous voyons n'est pas la réalité.
C'est une version hyper-sélective, hyper-filtrée, hyper-idéalisée.
Ce n'est pas un mensonge. C'est une partialité.
Ce n'est pas une tromperie. C'est une sélection.
Chaque fois que l'admiration devient envie, rappelle-toi:
Tu compares ton making-of à leur best-of.
2. Changer de référentiel
La seule personne à qui tu devrais te comparer, c'est toi-même.
Toi d'hier. Toi d'il y a un mois. Toi d'il y a un an.
Ce runner qui court 200km ? Impressionnant.
Mais si tu passes de 0 à 5km, ton progrès relatif est infiniment plus grand.
Ce designer aux millions de followers? Admirable.
Mais si tu passes de 0 à 1 client satisfait, ton impact est tout aussi réel.
Cette entrepreneure qui lève des millions? Inspirante.
Mais si tu passes de l'idée à ton premier prototype, ta progression est extraordinaire.
3. Célébrer chaque pas
Nous avons perdu l'art de célébrer les petites victoires.
L'art d'apprécier le chemin autant que la destination.
L'art de savourer le présent au lieu de nous projeter constamment.
As-tu couru aujourd'hui ? Victoire.
As-tu créé quelque chose ? Victoire.
As-tu aidé quelqu'un ? Victoire.
As-tu appris quelque chose ? Victoire.
As-tu dis à ton âme sœur que tu l’aimes ? Victoire.
La vie n'est pas une ligne d'arrivée.
C'est une succession de moments précieux.
De petites victoires quotidiennes.
D'apprentissages constants.
4. Comprendre notre unicité fondamentale
Sais-tu quelle est la probabilité que tu existes?
Environ 1 sur 10²⁶⁸⁵⁰⁰⁰.
C'est un nombre si astronomiquement grand qu'il est pratiquement impossible à concevoir.
Tu es, littéralement, un miracle statistique.
Une combinaison génétique unique.
Un ensemble d'expériences inimitable.
Un point de vue singulier sur le monde.
Comme le disait Albert Einstein: "Tout le monde est un génie. Mais si vous jugez un poisson à sa capacité de grimper à un arbre, il vivra toute sa vie en croyant qu'il est stupide."
Libérer la joie captive
La comparaison est bien une voleuse de joie.
Mais nous avons le pouvoir de reprendre ce qu'elle nous a dérobé.
Nous pouvons choisir de:
Célébrer nos singularités plutôt que nos similarités
Apprécier notre parcours unique plutôt que de suivre des chemins balisés
Cultiver notre propre jardin plutôt que d'envier celui du voisin
Transformer l'admiration en inspiration plutôt qu'en dévalorisation
Car au fond, nous n'avons qu'une vie.
Une seule et précieuse vie.
Veux-tu vraiment la passer à courir après des mirages ?
Ou préfères-tu la savourer, l'explorer, la vivre pleinement?
La comparaison te vole ta joie.
Il est temps de la reprendre.
À très vite,
Michel
📝 Citation du Jour
« Dans 20 ans, vous serez plus déçu par les choses que vous n'avez pas faites que par celles que vous avez faites. Alors, sortez des sentiers battus. Mettez les voiles. Explorez. Rêvez. Découvrez. »
— Mark Twain
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